Les fleurs d’hiver à avoir dans son jardin
Avez-vous remarqué que chaque année, la floraison des hellébores (roses de noël) accompagne l’hiver jusqu’au début du printemps ? Que les muscaris exhibent leurs fleurs dès le mois de mars ? Que les tournesols fleurissent à partir du mois de juillet ? Ou encore que les fleurs de colchiques ne sortent de terre, sans feuille, qu’une fois que l’automne se fait sentir ?
Cela n’est pas dû au hasard ! Si la floraison suit les saisons, c’est parce que les plantes sont capables de communiquer avec leur environnement.
Pas de fleurs en hiver ?
Une vraie fausse idée !
Mais alors, quelles seraient les raisons pour que des plantes décident de fleurir plutôt en hiver ?
Après avoir lu cet article, vous saurez justement pourquoi les roses de noël fleurissent prématurément ou encore pourquoi les pommiers ne peuvent être cultivés que dans certaines régions du monde. On vous parlera d’évolution, d’avantage sélectif, de stratégies de pollinisation et aussi de comment l’être humain a su dompter cette nature pour son alimentation mais aussi son plaisir… le tout, bien sûr, largement illustré ! Et pour finir on vous donnera notre « top 21 » des plantes qui fleurissent en hiver sous nos latitudes à installer absolument dans vos jardins et sur vos terrasse !!!
Ce n’est pas tout à fait vrai…
Combien de fois avons-nous entendu : « J’aime pas l’hiver : les journées sont courtes, il fait froid et il n’y a pas de fleur dans les jardins ! » ?
Sous nos latitudes, la vie des plantes est rythmée par l’alternance des saisons. Et, au cours du temps, en fonction des signaux échangés avec leur environnement, les plantes ont « décidé » de leur période de reproduction dans l’objectif d’assurer la pérennité de leur espèce. Car oui, même si les fleurs nous enchantent, la floraison est avant toute chose une affaire de reproduction !
Ce sont principalement des signaux de photopériode (rapport entre la durée du jour et la durée de la nuit) et de différences de température qui vont permettre aux plantes de se synchroniser avec les saisons. Et donc, à l’inverse de la plupart des plantes, celles qui fleurissent en hiver sont des plantes « de jours courts » : elles fleurissent en réponse au raccourcissement de la durée du jour.
Toutefois, il est vrai qu’en période de froid, les végétaux sont couramment en état de dormance, c’est-à-dire que leur croissance, leur développement et leur activité en général sont temporairement interrompus… et que, pour une plante, le fait de fleurir est un processus couteux en énergie tout autant que de faire en sorte que ses fleurs, fragiles, ne soient pas altérées par le froid, la neige ou encore le gel.
Mais, n’oublions pas que le principe fondamental de la vie est de pouvoir exister et se transmettre quel que soit le contexte et l’environnement dans lesquels elle se trouve en termes de température, d’hygrométrie, d’exposition à la lumière, etc. y compris des conditions pouvant être mortelles pour la plupart des autres organismes (températures proches ou supérieures à 100 °C ou, au contraire, inférieures à 0 °C, pressions importantes, milieux chargés en sel, milieux acides, milieux sombres, etc.)… Nous parlons alors de plantes extrêmophiles.
Dès lors que nous parlons d’êtres vivants, tout et son contraire peut être possible ! Ce qui veut dire que, si nous revenons à notre exemple de floraison en période hivernale, ces plantes présentent un atout singulier – que d’autres, en majorité, n’ont pas – et qui leur confère l’avantage, qualifié de « sélectif », d’attirer les rares insectes pollinisateurs présents à cette période de l’année. Dans ce cas très précis de pollinisation dépendante d’insecte, ces plantes sont dites entomophiles : elles aiment les insectes !
C’est donc pour de bonnes raisons que l’évolution a amené certaines plantes à fleurir à la pire saison : l’offre en fleurs est moins importante qu’au printemps mais la pollinisation en est possiblement plus efficace du fait de la moindre concurrence face aux pollinisateurs ! Il s’agit de la méthode que le jasmin d’hiver (Jasminum nudiflorum), les différentes espèces d’hamamélis ou encore le perce-neige (Galanthus nivalis) ont choisi.
Une autre stratégie de pollinisation utilisées par les plantes qui fleurissent en hiver et qui s’affranchissent des butineurs est la dispersion du pollen par le vent. Et nous pouvons aisément comprendre que ces plantes dites anémophiles puissent profiter de l’absence de feuilles pour optimiser la circulation de leur pollen autant que l’efficacité de leur fécondation. Cette stratégie est observée chez les arbres dont les fleurs sont des chatons (inflorescences souples, pendantes et sans parfum), comme chez le noisetier (Corylus sp.) par exemple. Entre les mois de janvier et mars, les grains de pollen, très abondants et très légers chez les anémophiles, sont transportés par le vent depuis les fleurs mâles vers les fleurs femelles – qui restent épanouies de façon exceptionnelle pendant environ 3 mois. Ce mode de pollinisation est d’une efficacité optimale, et ce même si la fécondation à proprement dit n’aura lieu qu’au mois de mai suivant, toujours pour une question de préservation de l’énergie !
Quoi qu’il en soit, une fois de plus, ne faisons pas de grandes généralités sur l’anémophilie hivernale. Elle a bel et bien été favorisée par l’évolution mais elle obéit aussi à un compromis très rigoureux qui fait que d’autres plantes également anémophiles, telles les céréales, fleurissent au printemps et non pas en hiver…
Quoi qu’il en soit, une fois de plus, ne faisons pas de grandes généralités sur l’anémophilie hivernale. Elle a bel et bien été favorisée par l’évolution mais elle obéit aussi à un compromis très rigoureux qui fait que d’autres plantes également anémophiles, telles les céréales, fleurissent au printemps et non pas en hiver…
Mais ce n’est pas tout à fait faux non plus !
Nous vous avons dit qu’en période de froid, les végétaux sont couramment en état de repos végétatif – ou dormance – et que, fleurir en hiver semblait être une stratégie efficace et compétitive pour avoir davantage de chance, pour une fleur, d’être fécondée.
Les fleurs, outre le fait d’être le plus souvent jolies à regarder, abritent et protègent les organes reproducteurs mâles (étamines) et femelles (carpelles). Par leurs parfums, leurs couleurs et leurs nectars, bon nombre d’entre elles attirent les pollinisateurs dans le but de donner naissance à des fruits, structures adaptées tout autant à la survie qu’à la dispersion des graines qu’ils renferment. L’apparition des fleurs et des fruits a été le moteur de la colonisation de tous les milieux, y compris aquatiques, des plantes à fleurs ou angiospermes, « à graines cachées ». Et oui les plantes n’ont pas toujours eu des fleurs, mais ça on vous en a déjà parlé (« Une fleur a changé le monde« )
Mais, nous le savons tous, les fleurs sont fragiles et leur descendance serait compromise à coup sûr si des conditions trop sèches, trop humides ou trop froides venaient à être rencontrées dès lors que la « décision de fleurir » a été initiée. C’est ce qui fait que certaines années il n’y a pas ou peu de cerises, de noix, de coings, etc. pour ne parler que des espèces végétales cultivées. Et c’est ce qui fait aussi, qu’il y a moins de risques, pour une plante, de fleurir à la belle saison plutôt qu’en hiver : il suffit juste de fleurir au bon moment !
Une chose est sure : le froid est essentiel !
Sous nos latitudes, la quasi-totalité des plantes ne peuvent en effet se passer du froid. Que l’on parle de dormance ou de vernalisation (période de froid nécessaire à une plante ou à une graine pour la rendre « active », la faire passer du stade végétatif au stade reproductif), le froid va stimuler la synthèse d’hormones qui permettront le développement des bourgeons plus tard dans la saison.
Et, le facteur normal de la levée de dormance est le froid hivernal. Si la dormance est faible, les premiers froids de l’hiver peuvent être suffisant à la reprise de la croissance. C’est ce qui explique la floraison prématurée des roses de noël. Il faut dire que, le plus souvent, les bourgeons « à fleurs » ont une dormance moins affirmée que les bourgeons « à feuilles ». C’est pour cela que les jasmins d’hiver et les forsythia (Forsythia sp.) fleurissent avant l’apparition de leurs feuilles. Tout comme, parfois, nous pouvons observer la floraison des marronniers en automne suite à la levée de dormance causée par un épisode sec suivi d’une période de précipitations intenses. En conditions contrôlées, ce processus est reproduit par les horticulteurs notamment avec les tulipes, pour leur permettre de fleurir durant les mois d’hiver.
Pour les plantes annuelles (plantes dont le cycle de vie ne dure qu’une année), la floraison est une conséquence directe d’une diminution importante des températures, proche du gel. Il est possible de voir fleurir 7 à 10 semaines plus tôt que la normale certaines céréales d’hiver cultivées, si les graines sont semées avant que le froid ne fasse son œuvre, en automne !
Des plantes telles que les pâquerettes (Bellis perennis), les pensées (Viola sp.), les myosotis (Myosotis sylvatica) ou encore les giroflées (Erysimum sp.) présentent un cycle de vie court, à cheval sur deux années. Semées en fin de printemps ou en été, elles ont absolument besoin d’une vernalisation avant de pouvoir fleurir au printemps suivant, de former leurs graines puis de disparaître.
Chez les arbres, et notamment chez certaines espèces fruitières tels les pommiers (Malus sp.), plus de mille heures de froid sont nécessaires. De ce fait, les conditions optimales de développement des pommiers limitent leur culture à des zones tempérées fraîches où l’intensité lumineuse est forte et où les journées sont chaudes et les nuits fraîches. D’autres espèces d’arbres fruitiers moins résistantes au froid et présentant une floraison plus précoce ont leurs aires de répartitions plus au sud que celles du pommier. Chez le pêcher, par exemple, de courtes périodes de froid sont nécessaires pour quelques variétés alors que chez d’autres, pas du tout.
Il faut également savoir que, si nos grands-parents connaissaient les plantes et la manière dont elles devaient être cultivées de façon empirique, aujourd’hui de nombreuses équipes de chercheurs à travers le monde travaillent sur les mécanismes impliqués dans la dormance, la vernalisation et, bien sûr, la floraison ! Les mécanismes de la floraison ont notamment été compris grâce à l’étude de plantes modèles, parfois très éloignées génétiquement des espèces dont nous parlons ici. Nous vous avons déjà parlé de la plante modèle Arabidopsis thaliana, plus connue sous le nom d’Arabette des dames (« Une souris verte »).
Et si, comme nous, vous êtes lyonnais, nous vous invitons à visiter le jardin d’hiver, du parc de la tête d’or. Vous découvrirez une collection de plantes qui ont pour point commun de résister à des températures plutôt froides et de présenter la particularité de fleurir en plein hiver – d’octobre à février – ou très précocement dans la saison – de mars à avril (Jardin D’Hiver ). Vous en reconnaitrez à coup sûr tout en apprenant leur origine et vous en découvrirez d’autres qui ne pourront que vous inspirer dans l’évolution de votre jardin…
Pour aller plus loin
Voici une liste de quelques plantes qui fleurissent au cours de la période hivernale – de novembre à mars – un peu plus originales que celle dont on entend parler tout le temps. Mais nous le savons tous, l’originalité peut avoir un prix ! Ces plantes ne seront peut-être pas disponibles dans votre jardinerie favorite ou chez votre pépiniériste…
Nous vous encourageons donc à suivre notre actualité pour découvrir les lieux et dates de foires aux plantes (rares) ! Vous y trouverez des espèces et des variétés justes fabuleuses accompagnées de conseils, d’astuces, de passion et de beaucoup d’humanité.
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