« Figuier au balcon, bonheur en toute saison »
Le Figuier : un Ficus parmi les Ficus
Les ficus, on croit tous les connaitre. Que ce soit le très classique Ficus benjamina de nos appartements, le Ficus elastica – ou « caoutchouc » – de nos grands-mères ou encore le Ficus microcarpa ‘Ginseng ‘ dont on fait de très jolis bonsaïs. Sous nos latitudes, ce sont en effet des plantes d’ornements assez rustiques pour résister « aux climats » de nos intérieurs et aux oublis d’arrosage…
Lorsque vous aurez lu cet article, vous verrez qu’un ficus n’est pas juste un ficus et que, sans le savoir, vous en avez croisé plusieurs autres espèces. Vous en avez même mangé ! Alors venez avec nous pour un fig trip ;o)
En réalité, il existe plus de 750 espèces de Ficus à travers le monde, principalement en régions tropicales. Ils appartiennent à la famille des Moracées, tout comme le mûrier (Morus Bombycis), nourriture préférée du ver à soie. Ce que l’on sait moins c’est qu’il existe une espèce de Ficus européenne, enfin méditerranéenne, que l’on cultive en extérieur pour ses fruits : le figuier commun ou le figuier de Carie, Ficus carica.
Le figuier a été le premier arbre fruitier à avoir été domestiqué (= amélioration quantitative et qualitative des productions végétales suite à l’action de l’Humain pour se nourrir) au Moyen-Orient il y a plus de 12 mille ans. Il a accompagné toutes les civilisations antiques de la Mésopotamie jusqu’à l’Empire romain en passant par l’Egypte ancienne… Le figuier est devenu un végétal hautement symbolique.
Sacré Figuier !
Dans les traditions judéo-chrétiennes, assimilé à l’arbre de vie dans la Genèse, les feuilles de figuier ont servi de cache-sexe à Adam et Eve lorsqu’ils ont été chassés du paradis terrestre.
Dans la tradition bouddhique, c’est une autre espèce de figuier – Ficus reliogiosa – qui est vénérée : Bouddha ayant atteint l’Eveil sous son feuillage.
Dans la religion hindouiste, la feuille du figuier des banians (Ficus benghalensis) est le lieu de repos du dieu Krishna. Ce figuier est l’arbre d’immortalité et de fertilité. Le banian aurait nourri l’humanité au moyen de son « lait » bien avant l’arrivée de toute autre forme de nourriture. On le rencontre fréquemment aux cotés des temples voire des cimetières. Par ailleurs, le développement particulier du Ficus benghalensis qui vient s’appuyer sur tout ce qui lui passe sous les branches et les racines lui vaut le nom de « figuier étrangleur ».
Symboliquement, les hindous y voient un lien entre le monde céleste et le monde terrestre : l’arbre permettant d’unir le tout !
Aujourd’hui encore, la symbolique du figuier est forte. Elle est le plus souvent liée à l’abondance et à la richesse spirituelle.
Dans notre inconscient, le figuier et ses fruits sont liés au bien-être. Leur représentation nous apaise et fait naître en nous l’envie de profiter. Au cours du temps ils ont inspiré bon nombre d’artistes. Connaissez-vous le vase d’Émile Gallé (célèbre maitre verrier) réalisé en 1898 et présenté à l’Exposition Universelle de 1900 ?
Et l’hôtel Figueira de Lisbonne ? Cet établissement de charme a été décoré par l’architecte d’intérieur Nini de Andrade Silva. Tout en lui incarne le figuier et l’odeur de la figue mûre et vous invite littéralement à plonger dans un récit magique et intime, rempli de détails inattendus… croyez-nous, l’expérience est inoubliable !
Reproduction & production ? Quel mic-mac !
Mise à part sa dimension sacrée, le figuier est surtout connu et reconnu à travers le monde pour ses fruits si particuliers et délicieux consommés autant frais que séchés. D’ailleurs, une fois n’est pas coutume le fruit du figuier n’en est pas vraiment un (voir La controverse du potager).
La figue est une structure complexe appelée sycone. Il s’agit d’un réceptacle floral refermé sur lui-même avec juste une toute petite ouverture (l’ostiole) qui permet le passage d’une minuscule guêpe pollinisatrice (le blastophage). Les fleurs, elles aussi minuscules, sont bien cachées. Une fois fécondées, elles donnent naissance à de petits fruits secs : les akènes.
Au cours de l’évolution, la guêpe et le figuier ont développé une relation tellement intime qu’ils ne peuvent se reproduire l’un sans l’autre : la guêpe, par son passage de figuiers « mâles* » en figuiers « femelles* », transporte le pollen afin d’assurer la fécondation croisée et la production de graines. Et, les figuiers « mâles », quant à eux, offrent à l’intérieur des sycones, une pouponnière pour la descendance des guêpes qui y pondent leurs œufs. Les larves éclosent et se développent en mangeant les tissus internes du sycone. Les figues des arbres « mâles » ne se transforment donc pas en fruits charnus à l’inverse des figues des arbres « femelles ».
* D’un point de vue botanique, le Ficus carica n’est pas vraiment une espèce dioïque (= espèce avec sexes séparés) mais on parle tout de même d’arbres « mâles » et « femelles » d’un point de vue fonctionnel. En fait, tous les arbres sont hermaphrodites (= les 2 sexes sont présents sur un même individu) mais chez certains d’entre eux :
- Les fleurs femelles ont de longs styles (= organe reliant l’ovaire au stigmate) qui empêchent les guêpes de pondre -> le développement du fruit est possible. On parle d’arbres « femelles » ;
- Les fleurs femelles ont des styles courts qui permettent aux guêpes de pondre -> les larves mangeant les ovules rendent le développement du fruit impossible. On parle d’arbres « mâles ».
Vous vous en doutez, depuis plus de 12 mille ans, les Humains ont vite compris qu’il y avait des figuiers qui donnaient des fruits agréables à manger et d’autres non. Ils se sont donc focalisés sur les arbres « femelles » et n’ont conservé que quelques arbres « mâles » pour assurer la pollinisation. On appelle d’ailleurs les figuiers « mâles », les caprifiguiers, ou figuiers de bouc !
Et comme si les choses n’étaient pas suffisamment compliquées, on s’est aperçu que certains arbres « femelles » fructifiaient sans qu’il y ait de pollinisation : les réceptacles floraux se développent sans fécondation des ovules, un peu comme la banane qui ne contient pas de graines. On appelle ce phénomène botanique : la parthénocarpie.
Actuellement, la plupart des 750 variétés de figuiers cultivés sont parthénocarpiques. Ce qui signifie : « plus besoin de figuiers « mâles » et plus besoin de la petite guêpe pour avoir des fruits » ! Et vous comprenez bien que s’il n’y a plus de fécondation, il n’y a plus de graines non plus !
Mais alors, comment fait-on pour avoir des petits figuiers chez les pépiniéristes ? Et bien toutes les variétés actuelles sont multipliées par bouturage : on coupe une jeune branche avec quelques feuilles, on la met en terre, elle s’enracine et le tour est joué. Enfin presque ! Avec un seul arbre, on peut faire des milliers de petits figuiers identiques à l’arbre « mère ». Il s’agit de reproduction clonale. Tous les individus d’une même variété sont issus d’un seul et même arbre qui a été « sélectionné » il y a des centaines, voire des milliers d’années.
Bien sûr, les conservatoires botaniques nationaux, dont celui de l’île de Porquerolles au large d’Hyères, possèdent et entretiennent nombre de figuiers sauvages et cultivées, parthénocarpiques ou non, pour la préservation de l’espèce et la continuation de la reproduction sexuée.
La variété « Fayoumi » par exemple, à feuilles non découpées, n’est pas parthénocarpique et a donc toujours besoin de sa partenaire guêpe pour produire des fruits. Par contre, vous ne pouvez pas la cultiver au Nord de Montélimar, car le climat y est trop rude pour la survie de la guêpe. Ses fruits sont donc réservés à la Méditerranée seulement.
Et vous, c’est quoi votre figue préférée ?
Vous aimez la Blanche de Marseille, la Violette de Solliès, la Noire de Bursa, voire la Grise de Saint-Jean ? On peut les manger fraîches, les faire sécher, les rôtir, les mettre sur une tarte ou dans un crumble (avec des poires !), en faire des confitures, etc. Ces petits et grands plaisirs sont à portée de main, chez vous dans votre jardin ou sur votre terrasse.
Nous, on hésite encore entre la Marseillaise et la Goutte d’or… mais pourquoi faudrait-il choisir ?
Am stram gram… Comment choisir son figuier ?
Le figuier est un arbre qui donne des fruits rapidement après avoir été bouturé et il tolère plutôt bien une large gamme de conditions climatiques. Que vous habitiez la Provence ou les Hauts de France (certaines variétés tolèrent jusqu’à -18°C), un figuier trouvera sa place et s’épanouira en pleine terre tout autant que dans un pot pour peu que vous lui offriez de bonnes conditions de culture.
Les figues vous régaleront au début de l’été et en automne pour les variétés bifères (2 récoltes par an) et à l’automne seulement pour les variétés unifères (1 récolte par an).
Si vous vivez dans une région avec des gelées en avril et mai – vous connaissez Saint Mamert, Saint Pancrace et Saint Servais, les fameux « Saints de glace » ? – la première récolte de figues d’une variété bifère sera quasiment inexistante. Il sera donc préférable, dans ce cas, de planter une variété unifère précoce comme la Ronde de Bordeaux, la Noire de Barbentane ou encore la Pastillière.
En termes d’entretien – et de taille notamment – si elle n’est pas indispensable, elle peut permettre un port des plus harmonieux, mais attention : selon que la variété est bifère ou unifère, la technique n’est pas la même !
Une exposition à l’est ou à l’ouest lui convient tout autant qu’en plein sud. En pot, ce beau fruitier peut atteindre 1,50 m de hauteur et même un peu plus pour les grandes variétés. Vous imaginez déjà les figues que vous pourriez récolter, non ?
Même si la production est plus faible pour un arbre en pot, saviez-vous qu’en pleine terre, un arbre peut produire jusqu’à 100 kg de figues par an ?
À propos, connaissez-vous un autre arbre fruitier en pot capable de produire de jolis fruits et ce, en nombre ?
Pas vraiment ! Alors, appelez-nous, nous connaissons un pépiniériste tout autant passionné que passionnant et nous saurons dénicher le figuier de vos rêves. Parole de Garçons !
« Là où il y a des figues, il y a des amis »
Proverbe espagnol ?
Et, comme bon nombre d’arbres, il est préférable de planter son figuier à l’automne afin de lui permettre de faire ses racines et de s’installer. Si vous avez le choix entre un arbre à racines nues ou un arbre en pot, jetez-vous sur celui en pot qui se développera plus rapidement. Mais une chose est sure : n’attendez pas que les hirondelles reviennent !
Peu sensible aux maladies, le figuier se défend tout seul. Il y a bien quelques chenilles qui lui font des misères (la teigne du figuier, par exemple) en grignotant ses feuilles, mais un arbre en bonne santé saura surmonter ces petits désagréments. Ne serait-ce pas là le compagnon idéal ?
Alors, plus de tergiversation « mi-figue mi-raisin », laissez-vous tenter et adoptez un figuier !
Pour en savoir plus
Conservatoire Botanique National de Méditerranée
Les Mitonnages de Jacky. La Figue charnelle_Un fruit de l’été, la figue, et son arbre. France Culture, le 23/06/2018
Le cycle de reproduction de la guêpe du figuier
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